Publiée le 01 Août 2010

 

Categories: Viande, Boeuf, Restes, France
Yield: 4 Portionen

600 g Boeuf cuit
-- reste de pot-au-feu
150 g Poitrine fraiche
2 lg Oignons
2 Tomates
6 Cornichons au vinaigre
1 tb Huile
1 tb Concentre de tomates
1 ts Farine tamisee
1 Verre bouillon de pot-au-feu
0.5 Verre de vin blanc sec
Sel
Poivre

Rene Gagnaux

Il porte le nom d'un marechal, anglais de surcroit, mais Balzac a
prouve que c'etait un plat de concierge: et s'il etait bourgeois?

"MME Cibot, ancienne belle ecaillere, avait quitte son poste au
Cadran bleu par amour pour Cibot a l'age de 28 ans, apres toutes les
aventures qu'une belle ecaillere rencontre sans les chercher [...]
Elle demeura comme un modele de Rubens [...] Ses tons de chair
pouvaient se comparer aux apaitissants glacis des mottes de beurre
d'Isigny [...] De ses rapports avec le Cadran bleu, cette portiere a
l'oeil orange et hautain avait garde quelques connaissances en
cuisine."

La terrible Cibot etait la concierge du Cousin Pons. Elle cuisinait
pour un habitant de l'immeuble, le redoutable Schmucke: ce diner
consistait "en un ragout dont l'odeur se repandait dans toute la
cour. C'etait des restes de boeuf bouilli achetes chez un rotisseur
tant soit peu regrattier, et fricasses au beurre avec des oignons
coupes en tranches minces jusqu'a ce que le beurre fut tout absorbe
par la viande et les oignons, de maniere que ce mets de portier
presentat l'aspect d'une friture."

Balzac ne donne pas le nom de cette recette, mais a l'evidence c'est
celle du boeuf miroton, connue depuis la fin du XVIIe. Mais la
reputation etait faite sur un ton dedaigneux: "Plat de portier, de
concierge." Et alors!

Ces Messieurs les membres de l'Academie des gastronomes ne sont guere
moins snobs: a son propos, ils laissent tomber d'assez haut qu'il
s'agit d'une sorte de bouillie, d'une origine inconnue et qu'il ne
saurait etre question d'y meler Monseigneur le duc de Marlborough
(John Churchill): certes, pendant la guerre de succession d'Espagne,
il fut raille par une chanson dont le refrain "Marlbrough [sic] s'en
va-t-en guerre, mironton, mironton, mirontaine..." aurait pu laisser
supposer que... Et l'Academie de conclure gravement: "Ce mot ne
designe certes pas un manger de milord", non sans condescendre a
constater que "ce plat democratique [peut] se montrer savoureux si le
boeuf est d'une viande fine et tendre". Aucune reference a Balzac et
a la Cibot. Depuis, le plat a fait son chemin hors des loges,
jusqu'aux bistrots, non sans passer par les cuisines bourgeoises dans
lesquelles l'economie etait la regle, jusqu'a utiliser les restes:
ceux-ci ont donne aussi le hachis Parmentier, les salades de boeuf,
les farces et autres references de grande bouffe genereuse, odorante
et haute en gueule.

La recette (extraite du Boeuf, histoire, symbolique, cuisine,
Editions Sang de la Terre):

Couper la poitrine en petits lardons, le boeuf en lamelles
regulieres, les tomates en petits cubes (apres epluchage et
epepinage) et les cornichons en rondelles, eplucher et emincer les
oignons. Reserver le tout.

Faire revenir les lardons a la poele, ajouter les oignons, saupoudrer
de farine, melanger le tout, verser bouillon et vin blanc puis
laisser prendre la sauce. Ajouter les tomates, le concentre, les
cornichons, saler, poivrer. Repartir le boeuf dans un plat allant au
four, couvrir de la sauce et cuire 45 minutes a four moyen a 160 oC.
(Le Larousse gastronomique suggere en plus de gratiner a 260 oC avec
chapelure et beurre fondu: une eventualite fort discutee.)

 

 

Philippe Couderc


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